Interviews VI

Bouddhisme Actualités

Patrice Gros réalisa cette interview pour le magazine Bouddhisme Actualités de janvier 2004 afin de présenter aux lecteurs de cette revue le lien étroit existant entre la voie bouddhiste et le chemin du Reiki.

Komyo Reiki, le Reiki de la claire-lumière


Patrice Gros pratique et enseigne le Reiki depuis une quinzaine d'années. Depuis 4 ans, il s’est tourné vers l’enseignement du Reiki japonais originel. Récemment, il est allé au Danemark où il a participé à la cinquième rencontre internationale de Reiki. Élève du moine bouddhiste japonais Hyakuten Inamoto, il a reçu la transmission du «Komyo Reiki». Cette lignée particulière intègre des symboles originaux (shirushi) transmis par Chujiro Hayashi, leurs noms spécifiques (meisho), des mantras adaptés (jumon), et la façon correcte de s'y relier. Cet enseignement est un complément utile à tous ceux qui, en Occident, ont reçu les symboles et les mantras de la lignée de Mme Takata. Cette transmission est fondée sur l'enseignement d'une élève de Chujiro Hayashi, Madame Chiyoko Yamaguchi. Yamaguchi-san étudia avec le Dr. Hayashi de 1938 à 1940, durant ses visites semi-annuelles, dans son village natal. Le révérend Hyakuten Inamoto, moine bouddhiste de l'école de la Terre Pure, étudia avec Mme Yamaguchi tout au long de l'année 1997. Il fut l’un des tout premiers étudiants de Yamaguchi-san. Quand elle commença à enseigner d'une façon plus formelle le Jikiden Reiki (la «transmission directe du Reiki») durant l'année 2000, Hyakuten-san servit d'interprète de nombreuses fois lorsque les premiers étudiants occidentaux commencèrent à affluer...

 

Hyakuten Inamoto et Patrice Gros

Révérend Hyakuten Inamoto et Patrice Gros - Silkeborg - septembre 2004


Patrice Gros, en quoi cette approche du Reiki diffère-t-elle du Reiki enseigné en Occident ?


Dans l’enseignement japonais, l’accent est mis principalement sur l’aspect spirituel et profondément sacré du Reiki. Le Komyo Reiki est une méthode permettant d’atteindre la perfection personnelle et spirituelle. Il insiste sur l’obtention du satori (terme qui signifie éveil ou illumination), l’épanouissement et le développement de l’être. Hyakuten Inamoto disait que le but suprême du Reiki était de réaliser dai an shin ritsumei, c’est-à-dire l’état de l’esprit totalement en paix, libre de tout souci, et connaissant le dessein de sa vie. Anshin désigne la grande paix intérieure du cœur, le fait de se sentir en sécurité. Ritsumei se traduit par le fait de connaître la mission à accomplir dans son existence, se sentir en confiance et en état d'abandon en l’univers. Dans l’enseignement originel, la guérison physique, psychologique ou émotionnelle n’était pas le point principal, mais juste un passage permettant l’obtention du satori. L’objectif de Mikao Usui, le fondateur du Reiki, fut que toute personne pratiquant son enseignement (Reiki-dô) puisse atteindre un tel état.


Quels sont les moyens mis en oeuvre dans le Reiki pour parvenir à ce but ?


Tout d’abord, une forme de méditation assise tirée du bouddhisme Tendaï (école à laquelle appartenait Mikao Usui) que l’on appelle zazen shikan taza, ou méditation de la tranquillité. C’est le fait de s’asseoir en conscience, immobile, l’esprit posé, attentif et non distrait : revenir à l'instant présent. Zazen désigne un état de conscience sans mouvement, sans objet et sans référence. Shikan veut dire « seulement, uniquement, rien que » et taza, « être assis ». Cela signifie donc que notre pratique consiste à s’asseoir pleinement, inconditionnellement, avec passion et intrépidité, tel un tigre prêt à bondir ! C’est très intense de s’asseoir de cette façon, et l’on pourrait considérer que ce moment présent est le dernier instant (ou le premier) de notre vie. Nous lui offrons donc toute notre attention et notre pleine conscience. Il n’y a pas de futur, pas de choix, seul compte le moment présent. Nous pratiquons également d’autres formes de méditation, comme la posture des mains jointes au niveau du cœur (gasshö mokuso ho) ainsi que la visualisation de lumière à travers notre corps énergétique, avec laquelle on s'identifie. Cette méditation (joshin kokyu ho) est destinée à changer notre niveau de représentation et de réalité. Nous avons une perception de nous-mêmes et du monde comme étant fixes, solides, permanents mais aussi séparés, uniques, indépendants, autonomes et définitifs. Or, il n’en est rien ! La base même de notre être, l’essence même de notre identité, est énergie, ouverture et conscience pure. Par cette pratique, l’esprit s’ouvre et le monde entier, ainsi que nous-mêmes, sommes perçus en tant que luminosité. Les maîtres bouddhistes enseignent que si l’on va profondément dans la nature du soi, on atteint le niveau de claire-lumière ou de pure énergie, qui est un niveau non duel. Nous actualisons ainsi une pratique où nous faisons rentrer de la lumière-énergie, à l’intérieur de nous. Cette énergie nous habite ensuite complètement. L’idée centrale est de s’identifier à cette énergie-lumière, que nous sommes de toute façon dans notre réalité profonde.

Puis, vient la visualisation de symboles sacrés (shirushi), véritables archétypes spirituels, exprimant des qualités contenues en chacun, comme la force énergie, l’amour compassion et la sagesse connaissance. Cette visualisation est complétée par la récitation de mantras (jumon) spécifiques. L’enseignement du Komyo Reiki donne des indications très précises quant à l’utilisation et l’origine de ces symboles/mantras. Pour une fois dans le Reiki, tout est expliqué clairement, ce qui manquait auparavant ! Nous pratiquons notamment des chants de guérison spirituelle en relation avec ces symboles et mantras, et cela génère une profonde transformation pour tous les pratiquants.


Y a-t-il d’autres aspects importants au sein de la tradition du Reiki japonais ?


Oui, mais cela nécessite de participer à une courte retraite de deux jours minimum pour l’expérimenter pleinement et en comprendre le sens. Il s’agit de la transmission de ce que l’on pourrait appeler une « initiation », un fort transfert d’énergie. C’est d’ailleurs l’aspect du Reiki le plus merveilleux et le plus difficile à expliquer. La référence la plus proche serait celle du baptême. Les Japonais appellent cette transmission reiju qui signifie partager ou offrir l’énergie d’une dimension spirituelle. C’est une descente de lumière, le souffle de l’esprit. «Komyo » est d’ailleurs un terme bouddhiste qui fait référence à la lumière spirituelle. Cette initiation est une aide précieuse pour toute personne en quête d’éveil, et elle marque l’entrée formelle dans la voie du Reiki. Il est d’usage de la donner autant que l’on peut à ses étudiants. Le Reiki est un véritable art de vivre et un chemin complet d’évolution, plus qu’une technique de soin ordinaire. La méthode du Reiki est en soi très efficace mais c’est l’attitude intérieure du praticien, sa motivation profonde ainsi que sa qualité de présence, qui donne à cet art son véritable sens. Selon l’enseignement du Reiki, chaque être possède un potentiel de guérison, d’éveil, de sagesse et de bonté aimante. Cependant, ce potentiel est terni par de nombreux voiles ou obscurcissements divers. Par une pratique régulière du Reiki, ces facteurs perturbateurs sont donc progressivement purifiés, dissipés et nos qualités spirituelles peuvent alors s’épanouir librement. C’est pourquoi tout praticien se doit de générer cette clarté d’intention et de maintenir l’attention sacrée durant sa pratique. On pourrait définir l’intention comme l’aptitude à demeurer, avec clarté et non-distraction, dans l’instant présent. L’intention véritable doit ainsi s’élever de l’espace de l’attention. C’est pourquoi intention rime avec attention. Lorsque l’intention est juste alors, l’action devient pure.

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Patrice Gros