Approche du corps énergétique dans la pratique du Reiki
N° 115 - Printemps 2015
N’importe qui peut accéder au Reiki
parce qu’il commence à l’intérieur de soi.
Mikao Usui
L’art sacré du Reiki n’apporta pas une transformation immédiate
et fulgurante à mon existence, mais plutôt une (r)évolution
sûre et progressive, semblable à la croissance d’un arbre
majestueux qui prend ses racines en profondeur et dont la cime s’élève
et s’épanouit haut dans le ciel. Il est intervenu dans ma vie
après déjà dix années passées au sein d’un
enseignement traditionnel, tel que le bouddhisme Vajrayana et l’approche
non duelle si particulière du Dzogchen, et cela à la fois comme
un parfait complément et une nouvelle vigueur dans ma croissance spirituelle.
Le Reiki, en tant que chemin de vie et d’ouverture de la conscience,
permet de se voir tel que l’on est : c’est à la fois rencontrer
sa nature de guérison intrinsèque - non fabriquée, non
rajoutée, non créée -, sa “nature de Bouddha”
intérieure, ou nature divine, mais c’est voir aussi sa nature
de confusion - ses émotions, ses frustrations, son “samsâra”
- ce qui “coince” en soi et dans sa vie, dans une ronde sans fin,
et y faire face. Le Reiki, uni à la pratique de la méditation,
est devenu pour moi le meilleur des compagnons, le guide incomparable, sur
cette voie d’éveil et de libération, à la fois
physique, énergétique et spirituelle. Ma pratique actuelle s’exprime
surtout par l’enseignement : enseigner les autres, dans une énergie
de partage profond et intime, c’est aussi m’enseigner moi-même
et me révéler les splendeurs de cet art...
L’approche énergétique du Reiki est une pratique au-delà
du mental, une expérience non verbale et, en fin de compte, une discipline
spirituelle à part entière (Reiki-Dô). Dans l’enseignement
du Reiki, il est essentiel de comprendre que le corps n’est pas différent
ni séparé de l’esprit. Le corps et la conscience sont
simplement deux aspects d’une même réalité. Si l’on
agit sur le corps, c’est aussi sur l’esprit que l’on opère,
et vice-versa. Ainsi, si l’on touche profondément le corps, cela
revient à rencontrer la conscience de l’être soigné,
ainsi que son énergie. En somme, toucher le corps pour atteindre ce
qui est au-delà de ce corps !
Le Reiki est donc un art mystique de guérison de l’être
complet - corps, âme, esprit. Il n’est donc pas assimilable à
une approche médicale classique ni n’est régi par les
mêmes lois. Cela se ressent particulièrement lorsqu’on
aborde les symboles transmis durant les deuxième et troisième
degrés, les méditations dans lesquelles ils nous entraînent,
et qui confèrent à cet art une véritable dimension spirituelle.
Tout praticien devrait s’adonner à cette contemplation du coeur
afin de faire mûrir le Soi, caché derrière les apparences.
Voyage au centre du corps
Le véritable guérisseur passe peu de temps sur les symptômes. Il ne se réjouit que d'un coeur qui s'ouvre.
Haven Trevino
Il
est dit que le corps est le temple de l'Esprit. Les lamas tibétains
enseignent, quant à eux, que ce même corps est le "mandala
de l'Éveil" !
La médecine occidentale dissocie, fractionne, sépare le corps
de l'esprit, alors que, pour les Orientaux, il y a une étroite interdépendance
entre les deux, comme les deux faces d'une même réalité.
Toucher l'un, pour rencontrer et libérer l'autre, voilà le thème
d'une véritable approche énergétique, tel que le Reiki
le propose. Il est important de comprendre aussi que ce que l'Orient nomme
l'énergie fait le lien entre le corps et l'esprit.
De même, ce n’est pas seulement une partie spécifique du
corps qui est traitée, mais bien le coeur-esprit (la conscience), et
l’être en son entier. Il en est ainsi parce que l’on explique
en Orient que l’esprit chevauche les souffles internes d’énergie
qui circulent dans certains canaux spécifiques ("nadis" pour
les uns, comme en yoga, "méridiens" pour les autres, comme
en acupuncture). Apparaît alors tout un corps subtil constitué
de "chakras", de "tandiens", de “marmas” et
de "points majeurs", qui seront mobilisés lors d'un soin.
Ainsi, chaque point du corps est en fait un point de conscience où
s'inscrit une histoire, une mémoire... Selon la médecine de
l’Inde, les chakras sont des centres énergétiques
répartis le long du corps, de la base de la colonne vertébrale
au sommet du crâne. Ils représentent notre anatomie subtile et
remplissent une fonction aussi bien physique que psychique. Les chakras
ne s'inscrivent pas en tant qu'organes physiques, mais relèvent du
corps subtil. Ils sont cependant en relation avec les plexus nerveux, les
glandes endocrines et certains organes, selon leur localisation.
De même, toute une activité émotionnelle et psychique
leur est associée, ainsi que certains sentiments. Les chakras contrôlent
donc la structure et l'activité du corps physique, de l'énergie
vitale ainsi que les différents états de conscience. Tous les
chakras sont connectés les uns avec les autres et fonctionnent en interdépendance.
À eux tous, ils forment l'unité du corps énergétique.
Dans la médecine chinoise, on mentionne les trois "tandiens"
(inférieur, médian et supérieur) qui remplissent une
fonction analogue et représentent, pourrait-on dire, notre “arbre
séphirotique”. Ils sont reliés respectivement aux éléments
terre, eau et feu de l'alchimie taoïste, et à leurs aspects à
la fois physiques et psychiques (enracinement pour le premier, ouverture du
coeur et résolution des conflits internes pour le deuxième,
éveil spirituel et des capacités cognitives, avec le troisième),
tant les deux niveaux physiques/psychiques sont reliés, ne pouvant
encore une fois agir sur l'un sans mobiliser l'autre. Lu Dong Bing, dans le
“Le Secret de la fleur d’or”, nous dit d’ailleurs
que “le secret de l’alchimie réside
dans le feu de la conscience, l’eau de la vitalité et la terre
de l’attention”.
On pourrait mentionner ici l'importance du "hara", notre "deuxième
cerveau", dont on parle tant en ce moment, reconnu comme un centre majeur
dans l'enseignement du Reiki, et un lieu de guérison de toutes les
maladies. Il est à remarquer d'ailleurs que les circonvolutions du
cerveau ressemblent étrangement à ceux de l'intestin, ce dernier
permettant d'éliminer tout autant les déchets physiques, que
psychiques et émotionnels ! Le centre énergétique du
nombril est ainsi particulièrement stimulé lors d'un soin spécifique
(tanden chiryo ho), enseigné par l’association japonaise de Reiki,
en vue d'éliminer les toxines à la fois physiques (germes, parasites,
virus, bactéries, empoisonnements, etc.), émotionnelles (tristesse,
mélancolie, colère, inquiétude, irritabilité,
insécurité, peur, agitation, etc.) mais aussi mentales (phobies,
névroses, dépressions, pensées négatives, croyances
limitatives et autres scénarios d'échec). Là encore,
on voit qu'on ne peut agir sur un plan précis sans toucher l'ensemble.
On sait aussi en médecine ayurvédique et chinoise qu'il y a
toute une psycho-pathologie reliée aux organes (voir les "cinq
organes trésors", et les cinq loges correspondantes, connus de
l'acupuncture). Par exemple, lorsqu’un organe, pourtant physique, est
touché, c’est l’émotion qui lui correspond qui est
aussi traitée. On comprend dès lors que les maladies ou désordres
observés au niveau physique sont étroitement liés, en
fait, à des facteurs mentaux, des habitudes de vie et des conditionnements
psychologiques.
Cela n'est pas sans rappeler que, selon le Bouddha, ce qui obscurcit
ou empêche la perfection de l’esprit humain, ce sont les "kleshas",
termes traduit par afflictions émotionnelles, souillures, distorsions
mentales, émotions négatives ou mêmes concepts perturbateurs.
En résumé, une fois le corps-réceptable (ou "corps
miroirs") purifié de toutes ses mémoires, le corps essentiel
(ou corps de gloire) pourra alors rayonner sans entrave, révélant
la vraie nature de la conscience ! On comprend dès lors l'importance
d'une véritable pratique qui inclut toutes les dimensions de l'être,
tel que cela est proposé dans le yoga, les arts d'alchimie interne
taoïste (le Reiki pouvant, selon cette discipline, être considéré
comme une pratique de "nei-gong"), ou toutes approches énergétiques
prenant en compte le lien d'interdépendance qui existe entre le corps,
l’énergie et l'esprit.
La dimension profondément spirituelle que l’on rencontre dans
le Reiki (je fais référence ici aux écoles japonaises,
et non aux différentes déviations, coupés de leur essence,
dont l’Occident a parfois souffert) apporte une touche supplémentaire,
permettant d’actualiser, plus que la guérison du corps, la “grande
paix du coeur”, l’éveil spirituel. Comme me le confirmait
Nicole Montinéri : “Pour ceux qui ont oublié quelle est
leur véritable nature, le Reiki permet de se relier à nouveau
à leur source, d’avoir une perception puissante de la véritable
substance de la vie.”
©
Patrice Gros & 3ème
Millénaire