Vu sur : http://vivrelibre.free.fr/textes/portrait.html
"Portrait-robot" des sans-ego
Daniel Maurin
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Tout d'abord, il est clair qu'ils ont gardé
leur individualité et sont loin d'être standardisés,
encore moins des robots ! Leur caractère et leur tournure d'esprit demeurent,
même s'ils ont évolué. Certains sont fougueux (et le demeurent),
d'autres calmes et paisibles, d'autres très actifs, d'autres absolument
inactifs...
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La paix intérieure, dans les épreuves
comme dans les joies de l'existence. Cette paix n'est pas menacée par
les drames, les maladies, ni même les tortures. Appelée apatheia
dans le monde orthodoxe, elle est aussi la "Paix qui dépasse tout
sentiment" (Saint Paul).
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Le détachement des choses du monde.
Même s'ils vivent dans le monde, "ils ne sont pas du monde",
comme disait Jésus. Ce même détachement concerne à
la fois leur propre vie, celle des autres et les événements dans
lesquels ils évoluent.
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L'absence de peur, en particulier celle
de la mort, qui n'est pour eux qu'une formalité administrative ! Elle
concerne aussi les autres peurs existentielles telles que la peur de manquer,
la peur du lendemain, la peur de ceci ou de cela.
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La conscience ancrée dons l'éternel
présent. Le passé ne les taraude pas et l'avenir ne les
inquiète pas.
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L'absence de volonté propre. Le
"je veux" a disparu au profit de "ce qui doit être".
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L'abandon à la volonté divine,
à la divine Providence, à ce qui est.
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La bienveillance envers tous. Même
s'ils peuvent avoir des préférences au niveau relatif, leur amour
s'écoule d'une manière uniforme sur tout et sur tous.
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La non-violence, le respect des êtres
et des choses. Une attitude globale de non-agression : ne pas nuire à
quiconque. Ceci inclut bien sûr les animaux, les plantes, tous les règnes
de la Nature.
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La tolérance, basée sur
la conscience que la Vérité ultime s'exprime de multiples manières,
suivant les sensibilités individuelles et qu'elle revêt donc divers
visages tout aussi respectables les uns que les autres.
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La joie intérieure, inaliénable,
intarissable, que nulle tragédie ne peut effacer, même si des chagrins
sont ressentis au niveau simplement psychologique. "Mon Dieu, pourquoi
m'as-tu abandonné?", demande Jésus au Jardin des Oliviers
en référence à sa psyché, mais il ajoute aussitôt
la parole qui émane de son Moi profond, toujours en lien avec le Père
: "Non pas ma volonté, mais la Tienne, je remets mon esprit entre
Tes mains." Cette qualité s'épanouit sur la base de la plénitude
du cœur, la béatitude intérieure qui ne peut être ni
augmentée ni diminuée par les aléas de l'existence. Les
"bonnes choses" sont cependant appréciées à leur
niveau, et les "mauvaises" ne peuvent perturber en profondeur l'océan
de la plénitude.
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L'équanimité, qui n'est
pas l'indifférence, mais un regard égal sur les situations favorables
ou défavorables. La vie étant tissée avec ces deux polarités,
elles vont et viennent nécessairement comme le flux et le reflux et ne
sauraient troubler la quiétude du sage.
Tandis que l'indifférence traduit un manque de sensibilité, l'équanimité
coexiste avec une sensibilité très affinée, telle que l'émotion
religieuse ou artistique, l'émerveillement, l'enthousiasme, la joie de
vivre, la jubilation, l'exubérance.
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L'inspiration : le moteur des actes n'est
pas le raisonnement, mais l'intuition spirituelle, qui capte l'inspiration du
Ciel, comme un poste de radio accordé sur cette fréquence. C'est
"Radio Ciel" qui donne la musique et la ligne est établie en
permanence.
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La conscience cosmique. Au lieu d'être
confinée dans d'étroites limites, la conscience du sage embrasse
l'infini et se déploie dans la totalité de la vie cosmique. Il
a accès à toute la Vérité, au Souffle divin qui
respire à travers lui.
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L'omniprésence : de par sa conscience
illimitée, il est partout présent, tout en tous.
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Parfois l'omniscience, qui lui permet
de tout connaître à tout instant.
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La non-dualité.
Même s'il vit dans le monde des humains dans la dualité bien/mal,
agréable/désagréable, haut/bas, il vit dans sa conscience
profonde un état non-duel où tous les opposés sont réunifiés
dans l'Un. Dès lors, aucun conflit ne peut se manifester à ce
niveau de son Être où tout est calme, apaisé, harmonieux.
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Une vitalité hors du commun. Le
tableau précédent pourrait paraître à certains un
peu insipide, un peu trop calme peut-être, mais un tel être étant
connecté avec la Source infinie, génératrice et génitrice
des myriades de créatures existantes, possède une très
grande énergie. Il peut donc accomplir, en un temps très bref,
ce que d'autres ne pourraient réaliser en plusieurs années.
On pourrait objecter que de grands mystiques semblaient malades ou affaiblis.
Outre le fait que certains aient choisi le rôle de paratonnerres et décidé
d'offrir leur corps en holocauste, beaucoup connurent des maladies atypiques,
disparaissant d'un coup, comme elles étaient apparues.
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L'amour universel. Le fait d'explorer
des niveaux profonds de la conscience permet de réaliser des actions
d'une immense portée cosmique. Tandis que l'énergie de l'ego se
disperse dans des activités souvent stériles et contradictoires,
le non-ego accomplit des desseins universels et œuvre pour le bien de tous
les êtres.
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L'action juste : en l'absence d'ego,
il n'y a plus "personne" pour accomplir l'action ! C'est la force
cosmique d'évolution qui s'en charge. Le sage "agit sans agir, fait
sans faire". Les actions qui se réalisent à travers lui sont
focalisées, justes, bénéfiques pour tous.
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Le non-effort. Étant l'instrument
de la "volonté divine", il accomplit l'action suivant le désir
divin et réalise ses objectifs sans aucun effort. Ainsi que le proclame
Lao Tseu dans le Tao Te King : "Ne faisant rien, il n'est rien qui ne se
fasse." Cette qualité pourra réjouir certains, bien qu'elle
ne puisse être assimilée à la fainéantise ni à
la léthargie, bien au contraire. Ce sentiment de ne rien faire par soi-même
mobilise en réalité l'ensemble des forces de l'univers, qui œuvrent
à travers lui à la restauration et à l'évolution
de toute la création. Jésus ne disait-il pas : "Sans Moi,
vous ne pouvez rien faire?", ce qui veut dire que c'est le Christ cosmique
qui opère à travers le saint pour accomplir la volonté
du Père, le dessein cosmique d'évolution.
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Éveil à Soi, Éveil
à Dieu. Conscient de sa propre existence, enraciné dans
sa propre nature, dans le Soi, dans l'Être immortel, il a vaincu la mort
et le cycle des renaissances. Il est à jamais établi dans l'Un,
dans la béatitude du Royaume.
On pourrait citer bien d'autres qualités, telles que l'absence de désir (compulsif), le contentement, la joie parfaite, etc. »
La Voie de l'oiseau
La méditation est un chemin long et difficile que l'on
nomme “le chemin de la fourmi” (Pilpilya marg) dans la philosophie
du Védanta.
Le chemin de la connaissance ou la voie directe est appelé le chemin
de l'oiseau (Vihanga marg).
Une fourmi peut mourir en chemin avant d'atteindre la cime de l'arbre alors
que l'oiseau vole de branche en branche avec tant d'aisance !
Siddharameshvar Maharaj
Aujourd'hui, dans tous les domaines, l'homme est à la recherche de rapidité, d'efficacité. Si elle gère notre quotidien au plan matériel, parfois avec de bons résultats, cette dynamique de progrès peut-elle s'appliquer au plan spirituel ? Celui-ci n'est-il pas considéré comme une voie lente, laborieuse et difficilement accessible, se déroulant sur des années et pour certains, sur des vies ! Est-il possible de survoler "l'océan de l'ignorance" en avion plutôt que de tenter de le traverser à la nage ?
Certains grandes maîtres l'ont cru et ont enseigné "la voie de l'oiseau" pour la distinguer de "la voie de la fourmi", réservée aux méthodes basées sur la méditation, sur la lente transformation des pulsions désordonnées, l'apaisement des agitations mentales, des désirs et des passions.
Contrairement aux autres approches, la "voie de l'oiseau" n'essaie pas de transformer quoi que soit ! Elle s'interroge plutôt sur la nature de ce que l'on cherche à transformer : quelle est sa consistance, sa solidité, sa réalité ?
En cernant attentivement la nature d'un serpent endormi, on pourrait être soulagé en constatant qu'il ne s'agissait que d'une simple corde négligemment déposée dans un endroit obscur! Dès lors, à quoi bon chercher à apprivoiser ou à neutraliser le reptile, à s'interroger sur son pedigree, son espèce, sa toxicité ? Ne vaut-il pas mieux découvrir le pot aux roses ? Cette révélation de "ce qui est" nous mène droit au but en nous plongeant d'emblée au cœur de la Vérité ultime.
« Jugée parfois difficile, [cette approche] est cependant un merveilleux raccourci vers le but. [...] elle est d'une étonnante simplicité [...]. Ne requérant a priori ni foi, ni credo particulier, ni engagement dans aucune institution ou groupe spirituel, elle s'adresse indistinctement à tous, croyants ou non-croyants, et tout spécialement à ceux qui souhaitent cheminer sur leur propre voie, sans dépendance vis-à-vis de quoi que ce soit ou de quiconque. Elle ne nécessite même pas la guidance autorisée d'un Maître extérieur et s'en remet à la compétence du Maître intérieur, le seul vrai Maître.
Par ailleurs, elle ne demande pas de quitter le monde, d'entrer dans le silence, ni même de devenir adepte de la méditation pendant de longues années. Cette dernière pratique est d'ailleurs appelée parfois "voie de la fourmi", tandis que la voie de la compréhension se nomme "voie de l'oiseau" : elle est donc un précieux raccourci vers le but. Loin de nécessiter un retrait du monde, irréaliste pour beaucoup, elle se pratique au cœur de la vie active et même, paradoxalement, c'est là qu'elle excelle et produit les meilleurs résultats !
Contrairement aux autres chemins spirituels qui nécessitent silence, recueillement et concentration - conditions si difficiles à réaliser aujourd'hui - elle s'accommode fort bien de l'agitation, du bruit et même des turbulences du monde moderne. Ne nécessitant pas de se protéger du stress, ni de se mettre à l'écart - ce qui n'est pas non plus sans intérêt - elle se pratique au sein même de l'action et de la "pâte humaine", en plein vent et même dans la violence des cyclones.
Le lecteur se sentira sans doute intrigué par une proposition qui semble si contraire aux enseignements classiques basés sur l'ascèse, le renoncement, la quête du silence. Qu'il se tranquillise en sachant que cette voie n'est pas une création nouvelle, mais un chemin traditionnel, mal connu certes, souvent éclipsé par d'autres approches plus ésotériques ou confiné à une élite intellectuelle. Mais, que l'on se rassure, il est véritablement à la portée de tous.
Il ne nécessite aucune qualité intellectuelle spéciale, sinon une attention et une vigilance qui s'acquièrent avec la pratique. »
Extraits de : Déjouer les pièges de l'ego - Éditions
Jouvence
Présentation de l'éditeur :
Ami
ou ennemi, l'ego est notre compagnon de vie. Tapi au fond de nous-mêmes,
revendiquant sans cesse notre identité, il préside à nos
relations, à nos orientations de vie, à nos quêtes de savoir.
Omniprésent, plus intime à nous que nous-mêmes, il s'avère
souvent très encombrant.
Avec Déjouer les pièges de l'ego, l'auteur nous emmène
dans le labyrinthe de l'ego et nous invite à le rencontrer afin de mieux
le connaître, de jouer avec lui et surtout de déjouer quelques-uns
de ses tours les plus secrets.
Tout en reconnaissant ses qualités et ses prouesses, nous découvrons
qu'il nous maintient dans une prison, parfois dorée, mais toujours limitative.
Afin de prendre notre envol et de vivre la plénitude de notre potentiel
de créativité, de joie et d'amour, nous cherchons à sortir
de son emprise. Cela est rendu possible grâce aux exercices pratiques
que l'auteur propose ici pour nous aider à nous évader de cette
cage où l'ego nous enferme.
Comme l'oiseau qui prend son envol vers la vie, virevoltons dans la brise parfumée
de notre véritable nature, vaste, libre et légère comme
l'espace, soyons nous-mêmes !
« Lorsque la nature de l'ego a été clairement découverte, il cesse de nous posséder, car le masque est tombé. C'est alors que le Moi authentique peut apparaître. Il n'attend du reste que ce moment pour le faire : il se réjouit enfin d'éclater en pleine lumière. »
Daniel Maurin a, hélas, quitté son corps physique le 12 octobre 2004.